• Les Hautes Vosges enfin au Routard au printemps !

     

     

     

    Parmi mes trouvailles du bahut, des faire-part. De naissance, dont le mien. Une carte un peu crantée tout autour sur velin ou approchant qui ressemble à une carte de visite chic, en petit format. Monsieur et Madame Pierre Guy ont la joie d’annoncer la naissance de leur petite Catherine. Au bas en plus petits caractères, figurent le jour, 10 janvier 1951, et, à droite, l’adresse, 7, Petite-rue de Monplaisir, Lyon. C’est sobre, chic, vous dis-je, net et concis. Le trait de tendresse réside dans le « petite ».

     

    Autre découverte, les menus. Celui du mariage de mes parents, à Wisembach, le 10 avril 1950. En gardant en mémoire le fait que j’ai été conçue la nuit même, je ne peux m’empêcher de lire ce menu avec un œil gourmand et amusé. Quand un Bourguignon épouse une Alsacienne, les vins ont des noms prestigieux et locaux : Gewurz traminer, Meursault-Chevalières suivi de Meursault-Charmes, avant un Gevrey-chambertin et un Chambertin suivis du champagne et des liqueurs (sans doute de la framboise et du bon marc) après café. Les plats sont à l’unisson. Un parfait strasbourgeois ouvre le bal avant le pâté lorrain. Si je connais très bien le second que ma grand-mère servait à toutes les fêtes et dont je continue la tradition quand je suis là-bas, le parfait strasbourgeois ne me dit rien du tout, du moins l’appellation. Et internet ne me renseigne pas du tout sur ce plat. Truite meunière et asperges sauce mousseline suivaient avant la poularde de Bresse forestière, un savant mariage de la Bourgogne et des Vosges. Et un jambon glacé vosgien. Lui aussi m’est inconnu. Les coeurs de laitue fermaient le bal avant les desserts. Une bombe glacée plombières (que j’aimais bien et qui a presque disparu de l’offre glacée) se dégustait avec des petits fours, avant un Breton des épousailles. ???? Quest-ce ? Un gâteau bien sûr mais pourquoi avoir été chercher la Bretagne tout à l’ouest ? Mystère. La corbeille de fruits fermait la ban.

     

    Un an plus tard, les mêmes convives se retrouvaient à Wisembach, le 25 juillet 1951, pour mon baptême. Et le menu est sensiblement le même. Du copié-collé ! Non plus imprimé mais manuscrit de la main de papa, je crois. On avait juste remplacé les asperges par des haricots verts, c’était de saison. Et le gâteau s’appelait « Catherinette ». Peut-être avec une déco verte et jaune. Les vins n’étaient pas cités mais ils ne devaient pas manquer à l’appel, sachant que ma marraine Betty était fille de vigneron et négociant de Meursault, Augustin Brunet, et allait épouser un vigneron négociant de Santenay, Guy Prieur.

     

     

     

    La pluie

     

    Encore une belle redécouverte : la pluie. La pluie n’a aps bonne presse. Sauf pour le cultivateur quand sa terre manque d’eau, ce qui d’ailleurs est le cas. Mais dans l’ensemble, tout Vosgien vous dira que la pluie lui file plutôt le bourdon. Maman n’aimait pas. La forêt se recouvre de gros nuages, les arbres disparaissent pour laisser place à un rideau d’eau, barrant tout l’horizon. On est sous la douche. Et plutôt bien froide. Mais sans vent, généralement. Avant-coureur, il tombe juste pour laisser place aux cordes. Comme ces derniers temps, j’avais été totalement chanceuse, la pluie avait épargné mes séjours, pourtant fin septembre début octobre. La fin de la semaine sainte, le samedi, allait m’offrir cet ultime présent avant mon départ, dimanche de Pâques.

     

    Elle était annoncée et je l’ai bien sentie venir, avec ces nuages et ce petit vent inhabituel à Wisembach. L’attente a duré jusque vers 5 h du soir. Et les gouttes se sont détachées sur le bois de la buanderie, juste au dessous du toit. C’est sur partie de charpente que j’ai toujours regardé s’il pleuvait, de la fenêtre de cuisine. C’était le signal de ne pas sortir. Car contrairement à d’autres régions où même s’il pleut on sort (dans le Nord ou la Bretagne par exemple), ici on reste chez soi ou, si on est dehors, au champ, au pré ou au jardin, on rentre. Et on attend. Car elle commence mezza voce mais peut devenir très serrée. Ce qu’elle a fait ce samedi-là. Et comme quand j’étais petite j’ai été prise d’une soudaine envie de dormir, de m’assoupir. Avec la pluie, la brume descend sur la forêt devenue invisible. Horizon bouché. Puis lentement les écharpes de brume s’élèvent : « ça se lève » et on peut commencer à reprendre une activité normale. Comme c’était le dernier soir, je suis montée au col pour aller dîner à la Taverne du mineur de Sainte-Marie-aux-Mines. Je n’étais pas trop rassurée en virant sur ces épingles à cheveux qui hérissent la montée, l’horizon étant encore peu dégagé et la pluie jouant les prolongations avant de disparaître totalement une heure plus tard. En sortant du restaurant l’air était lavé, frais, régénéré. Plus trace de pluie, ça sèche vite. Etonnant changement d’atmosphère.

     

    J’ai vécu bien d’autres pluies. Sur les plages du Lavandou, l’été, où nous étions le seuls sous parasol avec quelques Nordistes ou Bretons ou Anglais ou Allemands, les;locaux ne se risquant pas sous quelques gouttes. Alors que c’est très agréable même de se baigner sous la pluie quand température de l’air et de l’eau se rapprochent et que le gris du ciel se mire dans la mer, confondant le tout dans une griserie aqueuse. Aux Saisies, dans les Alpes, l’été aussi, assortie à l’orage, au tonnerre et aux éclairs, la pluie m’a fait peur, me sentir seule au milieu des éléments déchaînés, sous la colère du ciel. En Bretagne, non loin du château de Jocelyn, la bruine faisait friser mes cheveux et cette pluie-là était juste douce, un peu comme une brumisation iodée. A Audierne, elle nous accompagnés durant les quinze jours de la location d’une maison spacieuse et confortable mais sans chauffage, en 1998, l’été de la coupe du monde foot… On faisait héroïquement cuire les viandes au barbecue fumant sous la pluie avant de les manger sous les couvertures à l’intérieur. Les hortensias bleus étaient magnifiques, les balades sur le chemin le long de la baie aussi. Il aurait fait juste quelques degrés de plus...

     

     

     

    Pluies de mousson, Nha Trang, Mandalay, Jaipur...

     

    J’ai vécu les pluies de mousson en été au Vietnam, à Nha Trang, au bord de la mer de Chine. Je revois la joie des enfants sautant dans les flaques. On déambulait dans la ville avec ces impers aux allures de sacs poubelles vendus pour deux sous par les petits vendeurs. Le seul choix était entre jaune, vert ou bleu et grâce à cet étrange sur-vêtement on distinguait les touristes, les Vietnamiens se contentant de garder leur habit, sachant bien qu’une heure plus tard tout serait sec, sous la chaleur des tropiques. J’adore cette sensation de pluie chaude qui ruisselle sur tout. Comme une attente bienheureuse. En Inde aussi, à l’arrivée à Jaipur, elle a jeté la ville dans de grands embarras de pousse-pousse. Elle est attendue dans ces grands réservoirs, comme à Bundi où la sécheresse est redoutée. En Birmanie, à Mandalay, elle transformait le sol des temples en patinoire. Seuls les éléphants semblent imperturbables sous son déluge. Elle évoque pour moi le sourire apaisé ou excité des gens. Du Vietnam j’ai rapporté en 2005 une photo en noir et blanc, un grand format superbe d’un photographe talentueux, Long Thanh, qui travaille (travaillait?) à l’argentique. Parmi ses clichés, j’ai choisi une femme et sa fille sous un parapluie sous la pluie, avec une lumière qui troue le ciel juste au-dessus d’elles. Je ne pense pas être la seule à l’avoir choisie… Cette image de bonheur et de mousson accompagne mon quotidien.

     

     

     

     

     

    Les Vosges enfin au Routard !

     

    L’annonce en a été faite par le Routard et Hachette : le massif des Vosges entre au Routard ! Sortie du guide prévue en avril prochain. Alleluia ! Wisembach en fera partie donc. En plus bien sûr de Gérardmer (attention prononcer Gérarmé et non Gérarmer) et de la route des Crêtes endeuillée par un récent accident mortel. Ce coin-là est déjà bien connu des touristes mais entre Remiremont et Saint-Dié, le touriste se fait plus rare. Ou alors de passage vers l’Alsace.

     

    Une cafetière de Saint-Dié qui tient le bar en face de la gare me le disait récemment : elle qui marche autour de Saint-Dié, à Robache, à la Madeleine, dans la forêt, et y emmène ses petits-enfants voit la marche abandonnée par les Déodatiens au profit du « magasinage », diraient les Belges. Aller « au Leclerc » et à la zone commerciale d’Hellieule aurait remplacé les balades revigorantes auprès de nos sapins. Enfin pas chez tous. Les randonneurs vosgiens proposent bien le tour du Kemberg pour le 1er mai. Et entretiennent les chemins existants balisés.

     

    Dans ce coin des Vosges, les Hautes Vosges - faut bien le dire, assez sinistré économiquement -, redevenu très rural, avec le gros atout de la forêt (le chauffage au bois redevenu à la mode), le tourisme ferait du bien assurément. Un peu comme dans le Nord, les Vosgiens ne sont peut-être pas encore les meilleurs ambassadeurs de leur patrimoine. Ils se sentent défavorisés par rapport à la riche Alsace, plus accorte, terre de vignes, et peut-être aussi aiment-ils leur tranquillité farouche.

     

     

     

    Je vois dans cette venue prochaine du Routard une aubaine pour notre maison aussi. L’immobilier vosgien des champs va peut-être s’envoler. Ne rêvons pas trop. Mais quand même… C’est chouette !

     

     

     

    Draps chiffrés et géraniums

     

    Mission accomplie : les draps sont triés, ficelés, prêts à vivre une nouvelle vie. Mesurer, mettre en tas… La majorité sont des draps pour des lits de 1m20, d’une personne ou deux très menues. Ils sont brodés des initiales en rouge dans un coin quand il s’agissait de draps de pension comme ceux de Marie-Louise Chambin, mon arrière grand-mère bourguignonne, de Maligny, ou d’Alice Guyot, la sœur de ma grand-mère Agnès. Taillés dans des tissus d’1m de large, ils étaient cousus à deux largeurs, avec la couture au milieu, pour ceux de dessous. Robustes ces bougres ! Marie Marterer (MM) avait aussi son chiffre. Aux couples éraient réservés les broderies plus élaborées. Les deux initiales des deux noms de famille scellaient l’union. GP pour Guy-Petitdidier, GC pour Guy-Chambin, etc. J’en ai gardé certains très beaux, tant par le tissu métis que par la broderie. « Certains n’ont jamais servi » me disait encore papa alors que je triais l’armoire de Musigny à Caluire à sa demande. Et c’est vrai ! Dire qu’on en referait des draps serait sans doute un pari risqué. On préfère la finesse de la percale à la dureté de ces étoffes sur la peau. Mais en nappe, rideaux, jetés de lit ou de canapés pourquoi pas ?

     

    Pas de couleurs, du blanc, et c’est tout !

     

     

     

    La couleur c’est celle des géraniums lierre installés au balcon et sur les marches de l’escalier extérieur de la cour. Pour égayer l’ensemble, faire Alsacien quoi ! Du temps de mes grands-parents il n’y en a jamais eu. Le tas de bois sied mieux aux rudes Vosges que la fleurette. La voisine d’en face, Yolande, femme de gendarme, habitant la gendarmerie historique du village depuis (seulement) vingt ans, en a été toute ravie. Elle a même traversé la route pour me le dire et s’offrir à mettre une goutte d’eau de temps en temps. Bonne idée ! On a parlé de la fontaine, des fontaines à sec.

     

     

     

    Rallye de Lorraine

     

    Saint-Dié était tout en fête avec les vroums du rallye automobile de Lorraine, sponsorisé, entre autres mais surtout, par Michel Thonnelier, le patron des carrelages installé à Wisembach. Lui-même court depuis trois ans, à la suite de deux de ses fils. Sa maman et sa sœur, déodatienne, étaient venues les encourager. Je lui ai parlé de notre maison. Elle voyait très bien laquelle et faisait le geste évoquant l’arrondi des fenêtres. Du charme, cette baraque, qu’on vous dit ! Elle est sur le Bon coin d’ailleurs, intitulée « Belle maison bourgeoise ». Avec de nombreuses dépendances dont une petite maison qui faisait mes délices d’enfant et pourrait très bien devenir une maison d’amis, avec quelques aménagements. Le tilleul a quitté la place après 35 ans d’ombre dense et de désagrément pour les voisins. Certes beau et majestueux, odorant, il aurait demandé un élagage annuel pour pouvoir le conserver. Voilà. Seule la souche rappelle sa présence. Une autre souche, plus petite, lui tient compagnie. La lumière est revenue sur la place qui paraît plus grande du coup. La remise en bois, ex-logis des lapins et des poules, est aussi du coup plus en vue. Pas très glamour, remplie de bois non coupé par papa qui l’appelait son « bûcher », elle peut néanmoins servir. La sœur de Michel Thonnelier évoquait la piste de location pour notre maison. Deux appartements, deux étages, plus cette petite maison. Oui pourquoi pas ?

     

    La prochaine fois, en juillet, ce sera au tour de l’armoire du bas, celle des nappes et serviettes, d’être triée avant le tour des bibliothèques… Le grenier n’a livré aucun secret. Des revues, du matériel d’enseignante, des souvenirs de mes grands-parents, de leur maison de Saint-Dié, rue d’Alsace. Mais sur le passé plus lointain, rien. Une pierre tombale, avec les inscriptions des deux jeunes disparus, Emile Pingeoz, séminariste de 18 ans, et Edouard Marterer, bébé de 9 mois, est revenue au jour, brisée. Mais j’ai reconstitué le puzzle. C’était la pierre qui a précédé le monument actuel en granit commandé sans doute à la mort de ma grand-mère.

     


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