• Le poids de l’héritage

     

    Une émission de la 5 abordait l’autre soir ce thème de l’héritage à travers différents témoignages tous sensibles et illustrant bien la diversité du propos mais aussi l’universalité de la question qui se pose à ce moment-là. « L’inconscient règle ses comptes » expliquait avec ses mots la psychologue. La notaire confirmait son rôle d’accoucheuse pour trouver le bon accord pour chacun. Le généalogiste trouvait son boulot passionnant : rechercher des héritiers, souvent proches du défunt par la lignage mais éloignés dans l’espace. La châtelaine de Dampierre était très émouvante et juste dans sa quête de transmission d’un patrimoine qui dépasse sa petite personne, frêle mais bien déterminée. « Nous sommes un maillon dans une chaîne » disait-elle en dessinant de sa main dans l’espace cette chaîne comme un collier de perles, peut-être. Cette conscience aiguë que la vie humaine est si courte, qu’il y a des choses qu’on doit léguer pour qu’elles continuent à vivre. Le bail emphytéotique à une personne qui n’est pas de la famille mais en capacité de reprendre l’oeuvre (un conservateur du Louvre), pendant 30 ans, avant que son petit-fils de 15 ans puisse décider s’il veut ou non assumer ce château, lui a paru une bonne solution. Son sourire en disait long sur son courage et sa lucidité. Son mari devait décéder dans les deux mois qui ont suivi cette signature.

     

    Le trio de frères qui se fâchent à propos de 60 000 euros donnés ou prêtés par leur père à l’un d’eux en disent long sur le solde des comptes vis à vis des parents dans cette histoire.

     

    Le frère et la sœur, cultivateurs qui doivent trancher qui aura quoi de la ferme et des hectares, cultivent aussi le silence. Bien que travaillant ensemble sur cette exploitation familiale. « Partager c’est abandonner » signale la psy. Oui chacun vivait avec l’entièreté du patrimoine dans sa tête. Se séparer d’une partie signifie faire son deuil de celle qu’on laisse à l’autre. Et c’est pas si facile. Même si – et surtout si – les enfants sont là pour continuer cette exploitation.

     

    Denis, le fils de Françoise Sagan – Dieu qu’il ressemble à sa mère dans les expressions de son visage, ses façons de dire les choses en les effleurant, d’être agacé de certaines questions, de laisser un sourire advenir – défend aussi un patrimoine. Passant sur les dettes qu’il a bien sûr à gérer, il a à coeur de faire vivre les écrits et restaurer la vérité sur sa mère si besoin. Son œuvre à lui.

     

    Affection, amour, devoir… Tous les attachements se pointent là, dans leur complexité et leur ingénuité, dans la mesure où ils attendent ce moment-là, celui de la mort pour réclamer leur dû. On a eu beau procrastiner, le plus longtemps possible, on est rattrapé par ceux-là. Et malgré ou à cause des conseils d’autrui obligés de décider seul. De trancher. Je me souviens d’un dessin peint sur le mur de notre colocation, avenue de Flandre, dans les années 70 débutantes. Noël, doué en dessin, avait affiché au mur un coeur sanglant découpé en tranches. C’était le sien, mis à mal par moi sans doute. Cela m’avait bien plus marqué que des paroles de reproche ou une bouderie. En plus c’était très bien peint, en petit au milieu du mur blanc. Notre bibliothèque de caisses en bois (dont on était très fiers) n’en menait pas large devant cette œuvre, ce cri !

     

     

     


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