• Chères maisons de famille ne vont pas sans nos chers disparus

    Surtout avec la mode des cendres dispersées. En vendant (ou en achetant) une maison, on se retrouve avec le grand-père dans le jardin, sous le châtaignier, au prétexte qu’il adorait les marrons. Dieu merci, pas de cela chez nous. Mes parents ont été les premiers à choisir d’être incinérés. Surtout par commodité, pour ne pas nous obliger au transport de corps jusqu’au caveau familial, à Wisembach. Mais leurs urnes sont bien au chaud, si je puis dire, dans ce caveau. Pas question pour eux d’être dispersés dans la nature. Ils prennent juste moins de place dans le caveau que des cercueils. Ce qui a fait dire à ma cousine lors de l’enterrement de maman : « ben tu vois, il reste de la place ». Et à mon frère de lâcher une phrase sur de la place pour moi, avec un sourire. « Le plus tard possible » ai-je répondu, comme le faisait papa.

     

    C’est vrai, moi je ne suis pas fan de penser à la mort, la mienne ou celle des autres. C’est le bon Dieu qui décide et puis barka ! Assez amusant de penser aux retrouvailles sous terre ou aux cieux de gens qui s’aimaient très modérément : je pense à mon père et à ses beaux-parents. Alors que son beau-frère et très bon copain, est avec sa femme, à Saulcy-sur-Meurthe. Ou à mon grand-père et à sa belle-mère. Mais une chose était bien établie dans ma famille : on ne sépare pas ceux que Dieu a unis, c’est à dire les époux. Donc mon père est à Wisembach et sa mère est à La Rochepot, avec son mari. Alors que les Guyot-Lhomme ont leur tombe à Musigny (que j’ai fait nettoyer cet été pour retrouver la blancheur de la pierre de comblanchien), près d’Arnay-le-duc, la ville de Claude Guyot, lui aussi de cette famille, dont une association, présidée par Hadrien Lacoste, se charge d’honorer la mémoire (résistant, maire progressiste, député à la Libération). Toujours sur ce même principe, grand-maman est enterrée à Saint-Dié, pour être avec son époux, décédé à l’hospice Saint-Joseph, à Saint-Dié, en 1919, alors que toute sa famille était enterrée à Wisembach. Dans la tombe des Colnat, du nom du mari de Louise, la sœur jumelle de ma grand-mère.

     

    Une sorte de regroupement familial prévaut généralement, ce qui est aussi plus économique, sauf dans les cas d’incompatibilité d’humeur de leur vivant. Mady ne voulait pas être enterrée avec sa mère à Auxerre. Donc il y a deux concessions. A Musigny, papa avait réalisé ce regroupement en mettant tous les os, provenant de trois tombes différentes, sous la même tombale. Auquel cas, tous les noms n’apparaissent pas (notamment ceux de la marraine de ma grand-mère Agnès Guyot et de son mari Ofstetter, cocher de la châtelaine de Musigny, Mme de Waldener). Une plaque Guyot-Lhomme apposée par papa, en granit, résume l’entièreté des morts de ces familles. A La Rochepot, deux tombes pour les deux branches des Guy, celle de Marius et celle de Louis. Où sont les ancêtres ? Mystère.

     

    Pour ma part, je ne suis pas fan des cendres. D’abord, ces cendres ne sont pas forcément les nôtres. Quand on est poussière, me direz-vous… Mais quand même. Ensuite, c’est une façon de rendre tout « mini dans notre vie », comme chantait Dutronc, quand ça arrange le commerce de la mort. Bien sûr une façon de s’adapter à notre nomadisme. Alors autant être enterré là où on meurt, non ? Bon si c’est à l’autre bout du monde, pas forcément simple pour venir se recueillir. Moi je n’aurais rien contre un cimetière avec « un pin, parasol de préférence, histoire de passer ma mort en vacances », comme disait Brassens, avec son demi-sourire à son contrebassiste, pas mécontent de sa feinte. Ou dans quelque cimetière marin, à la Paul Valéry, sous « midi le juste ». Mais la mort nous cueille où elle veut. En plein ciel, dans les flots, au milieu d’un hoquet, au fin fond d’un lit d’hosto, au resto, en auto. Alors n’anticipons pas, n’est-pas-ce-pas ?

     

     

     


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